Serov n’est pas mon peintre russe favori. J’ai plus de tendresse pour Avazovski qui me value une querelle avec le conservateur du musée russe. Nous nous sommes réconciliés avec force vodka. Comme quoi un russe n’est jamais un mauvais homme si l’alcool le prend dans les liens de l’amitié.
Ce tableau de Serov, Enfants (Sasha et Youra Serov), qui représente deux jeunes enfants regardant la mer, préfigure une célèbre photo où le tsarévitch scrute l’horizon de la mer Baltique. Les visages innocents pouvaient-ils prévoir le flot de haine et de mort qui allait s’abattre sur la sainte Russie quelques années plus tard ?
J’ai une tendresse toute particulière pour le tableau d’Anna Pavlova, jolie femme qui danse sur la pointe des pieds, dans un bleu lourd. Je ne puis m’empêcher de penser à trois jeunes femmes qui dansèrent et chantèrent, voici seulement quelques mois, dans une église de Moscou. Depuis les barreaux de leur prison, les regards pleins de solitude mais aussi de fragilité, nous interrogent sur la dureté de ce monde russe.
La Russie est un pays de violence que la peinture a souvent représenté avec férocité. Sourikov, Répine. Civilisation de contradiction, entre cruauté et douceur, entre amour et violence, la Russie n’est-elle pas masochiste ? Elire Poutine et défiler pour les Pussy Riots. Aimer Pouchkine et avoir idolâtré Lénine. C’est la Russie.
Serov nous fait partager la force claire, lumineuse de ce pays, à l’image de Sasha et Youra Serov, deux enfants au début du xxe siècle.
Si vous voulez en savoir plus sur Serov, consultez cette monographie sur Serov de Dmitri V. Sarabianov.
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